L’Afrique et la crise russo-ukrainienne.
La cornille (le haricot cornille) était au cœur des échanges, à l’Institut Sénégalais de Recherche Agricole (ISRA), entre chercheurs du Sénégal et de la France, producteurs tous azimuts, ainsi que tous les acteurs de la chaine de valeur, dans un colloque de deux jours co-organisé par l’Institut de Recherche pour le Développement (IRD) et l’ISRA.
La raison de cet atelier scientifique était de signifier à tous les sénégalais, sinon tous les africains, les énormes avantages du niébé (mbuengi en lingala), en tant qu’aliment traditionnel d’Afrique qui peut faire objet de moult transformations et donner lieu à beaucoup de produits hautement nutritifs, afin de pallier le problème de la pénurie de blé qui est en vue.
Gouverner c’est aussi prévoir
Puisque gouverner c’est aussi prévoir, l’Afrique aurait donc la responsabilité de mettre en place, illico presto, une politique d’autosuffisance alimentaire, notamment avec la culture de cette denrée locale aux vertus attestées, pour anticiper la disette mondiale qui s’annonce en termes d’importation de blé.
Le conflit armé Russie-Ukraine, les problèmes sécuritaires au Congo et ceux du sahel, la crise sanitaire etc. qui secouent présentement le monde entier nous ramènent à une évidence : l’agriculture est une des forces motrices de sécurisation de notre existence. Elle doit être davantage considérée.
Par ailleurs, l’Organisation des Nations Unies pour l’Alimentation et l’Agriculture (FAO), le Fonds Monétaire International (FMI), le G7, voire nombre d’organismes internationaux craignent tous la famine en Afrique. Ce, puisque celle-ci importe constamment les produits céréaliers de deux pays en guerre.
Vers l’autosuffisance alimentaire
Les effets collatéraux de la guerre entre l’Ukraine et la Russie préoccupent le commun des mortels. Le président français, Emmanuel Macron, a même annoncé le pire lors du récent sommet de Versailles, tenu le vendredi 11 mars 2022. « L’Europe et l’Afrique seront profondément déstabilisées sur le plan alimentaire dans les 12 à 18 mois à venir. Il nous faut réévaluer nos stratégies de production pour défendre notre souveraineté protéinique et alimentaire, mais aussi réévaluer une stratégie à l’égard de l’Afrique. »
C’est la tournure que prend le conflit armé russo-ukrainien, à l’échelle mondiale mais surtout africaine.
Et puisque la mondialisation s’avère être une interdépendance sans solidarité, il nous faut, nous africains, au-delà des difficultés actuelles liées aux crises multiformes notées, avoir la fine perception que la souveraineté alimentaire et nutritionnelle reste et demeure un pari important à gagner.
Toutefois, de la même manière que l’interdiction des importations de la volaille au profit de la promotion de la production locale est d’un grand succès au Sénégal, de la même que la culture du niébé peut solutionner le « futur » problème de pénurie de blé. Aux peuples africains de miser sur cette culture, et bien d’autres, qui puissent nous conduire à l’autosuffisance alimentaire pendant ce moment de forte turbulence.
Pascal Muteba
Dakar, le 14 mars 2022